“La réponse doit être multidimensionnelle, multisectorielle et régionale”

Metsi Makhetha, Coordonnatrice résidente de l’ONU au Burkina Faso

Metsi Makhetha, Coordonnatrice résidente de l’ONU au Burkina Faso. Photo DR

24 juin 2019

“La réponse doit être multidimensionnelle, multisectorielle et régionale”

Mme Metsi Makhetha, Coordinatrice Résidente du Système des Nations Unies au Burkina Faso depuis 2016, fait le point sur la situation sécuritaire et humanitaire au Burkina Faso. Elle parle aussi de l’appui des Nations Unies et de la communauté internationale au gouvernement burkinabè.  Entretien !

Quel est le constat que vous faites de la situation au Burkina Faso ?

C’est une situation difficile et complexe que connait le Burkina Faso actuellement. Le contexte sécuritaire ne laisse aucun répit, avec des attaques très fréquentes contre les forces de défense et de sécurité, les fonctionnaires publiques, les écoles, les centres de santé, les chefs coutumiers, les Imams et depuis peu les églises, pasteurs, prêtres chrétiens.

Je profite de l’occasion pour réitérer toute notre compassion avec les familles ont été endeuillées par les attaques des groupes armés et notre solidarité avec le peuple Burkinabè.

De par ses impacts, cette situation risque de retarder la marche du pays vers ses objectifs de développement et de paix durable. Elle fragilise la cohésion sociale et elle a occasionné le déplacement de milliers de familles, provoquant une situation d’urgence humanitaire que le pays n’avait jamais connu. Le nombre de personnes déplacées a triplé, passant de 50,000 en début de l’année 2019 a plus de 170,000 actuellement.

Les Nations Unies en collaboration avec les partenaires et la communauté humanitaire, restent fortement engagées aux côtés du gouvernement pour apporter l’assistance nécessaire aux populations les plus vulnérables. Cependant la rapidité de la degradation des conditions ont pris beaucoup d’acteurs de cours.

Concernant  le soutien des Nations Unies, une mission inter-agences demandée par le Secrétaire général s’est déroulée du 19 au 25 février dernier sous la direction du Représentant spécial pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel, Mohamed Ibn Chambas. Quel a été son l’objectif et quels sont les  résultats/ recommandations ?

Le Secrétaire General a voulu que les Nations Unies adaptent et renforcent l’accompagnement de l’ensemble du système, pour apporter une réponse adéquate et intégrée dans ce contexte difficile que je viens de décrire. Evidemment, la réponse doit être multidimensionnelle et multisectorielle.

Il s’agit de reajuster le cadre de nos interventions, défini conjointement avec le gouvernement selon les priorités du pays et qui s’inscrit dans l’agenda 2030, avec pour objectif principal - soutenir efficacement la marche du pays vers un développement et une paix durable.

Par la mission interagence nous voulons egalement traduire sur le terrain le noyau des reformes du système en particulier, une approche visant à agir à la fois sur la réduction des besoins humanitaires tout en renforçant les synergies avec les actions de développement et la promotion d’une paix durable, ancrée sur le respect des droits.

Par ailleurs, cette approche avait été déjà identifiée comme un accélérateur essentiel pour la mise en œuvre effective des priorités définies dans le cadre référentiel du pays, Programme National du Développement Economique et Sociale (PNDES 2016-2020) et pour permettre au pays de réaliser ces ambitions à l’horizon 2030.
Le contexte ayant changé  nous répondons donc différemment aux enjeux actuels. Les recommendations principales de la mission furent de nous renforcer, d’adapter nos méthodes de travail en projetant une présence additionnelle sur le terrain, afin d’accompagner des réponses plus adaptés aux enjeux locales.
Bien entendu, l’engagement pour la cohésion sociale et la stabilité politique telle que conduit par le RSSG reste primordial, y compris parce que le pays est en train de s’engager dans la preparation des elections de 2020.

Quelle est la priorité absolue aujourd’hui pour faire face à cette situation?

Le Burkina fait face à une urgence humanitaire qui requiert une réponse rapide et immédiate

La restauration des conditions de sécurité est indispensable pour la quiétude sociale, le retour des milliers de familles déplacées, la réouverture des écoles et le bon fonctionnement de l’état à travers ces différents services. Le gouvernement a mis les moyens pour y faire face mais la situation étant complexe, la réponse reste multidimensionnelle, transfrontalière et régionale.

Actuellement le pays fait face à une urgence humanitaire qui requiert une réponse rapide et immédiate. Aussi bien pour les personnes les plus vulnérables, que pour les communauté hôtes.  Nous avons - Nations Unies avec la communauté humanitaire ainsi que le gouvernement lancé un plan de réponse au mois de février 2019. Le plan est pour un montant de US$ 100 million pour apporter un appui à 1.2 million de personnes dans le besoin. Ce plan est aujourd’hui financé a moins de 50%. Pourtant les défis sur le terrain ne cessent d’augmenter.

La reponse du système doit etre rapide, et elle doit egalement rester coherente. C’est une oportunite pour nous de mettre en place les reformes systémiques telles que adoptées par tous les états membres à travers « l’Assemblée Générale ».  Mais les résultats et les conditions de notre engagement demeurent une responsabilité mutuelle et partagée ; Nations Unies, gouvernement et partenaires [développement/humanitaires et paix et sécurité].

Nous pouvons nous féliciter que les partenaires du Burkina Faso ont repondu présents pour relever le défi, et coordonnent étroitement. La visite récente du Conseil de Sécurité a aussi souligné la solidarité internationale qui devra aboutir sur une assistance effective.