Nouvelle étude de l'UNOWAS : L'état de droit, maillon essentiel de la résilience climatique en Afrique de l'Ouest
Le changement climatique n'est pas seulement une menace environnementale ; il s'agit d'une crise profonde de l'(in)justice et de sécurité qui déstabilise l'Afrique de l'Ouest et le Sahel. C'est la conclusion d'une nouvelle étude phare publiée par le Bureau des Nations Unies pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel (UNOWAS) et l'Unité opérationnelle d'appui pour la justice et les services correctionnels (JCSC) du Bureau des institutions de l’état de droit et de la sécurité des Nations Unies (OROLSI).
Qualifiée par le Secrétaire général de l'ONU de « problème déterminant de notre époque », la crise climatique exacerbe les vulnérabilités structurelles dans une région déjà aux prises avec la fragilité de l'État.
Une corrélation frappante entre climat, sécurité et état de droit
L'étude, lancée en 2024, établit une corrélation impressionnante entre état de droit, climat et sécurité. En croisant des données issues d'indices mondiaux comme le Rule of Law Index et l'Indice des États fragiles, l’étude révèle qu'un faible niveau de respect de l'état de droit va de pair avec une vulnérabilité climatique élevée et une situation sécuritaire précaire dans certains des pays d'Afrique de l'Ouest, objets de l’étude.
Le changement climatique agit comme un puissant amplificateur de menaces, exacerbant les pénuries de ressources, les déplacements de populations, les migrations et la criminalité transfrontalière. Ces pressions pèsent lourdement sur des institutions judiciaires et pénitentiaires souvent déjà fragiles.
Une crise d'(in)justice qui frappe les plus vulnérables
L’étude souligne que la crise climatique est fondamentalement injuste. Ses effets touchent de manière disproportionnée les populations les plus vulnérables : femmes, jeunes, petits exploitants agricoles, migrants et personnes en détention. Ceux qui ont le moins contribué aux émissions mondiales de carbone en subissent les conséquences les plus dévastatrices, renforçant les inégalités structurelles préexistantes.
Fait préoccupant, l'étude révèle également que de nombreux plans nationaux d'adaptation au climat (PNA) ignorent largement l'impact sur les systèmes de justice et de l'état de droit. Cette lacune crée un risque de « mal-adaptation », où des politiques mal conçues pourraient, de manière involontaire, aggraver les injustices et les vulnérabilités.
L'état de droit, un outil stratégique pour la résilience
Loin de se contenter de dresser un constat alarmant, l'étude propose une voie à suivre: l'état de droit doit être utilisé comme un point d'entrée stratégique et fondamental pour renforcer la résilience climatique et réduire l'insécurité.
L'état de droit offre des outils puissants pour lutter contre ces risques, notamment à travers des actions visant à accroitre une large prise de conscience de l’impact du changement climatique sur les cadres, institutions et processus juridiques et judiciaires et sur les droits fondamentaux individuels et collectifs des communautés, le renforcement des cadres juridiques existants et leur amélioration pour mieux répondre aux défis environnementaux et climatiques, l'autonomisation juridique des communautés locales, une gouvernance inclusive et participative des ressources naturelles, un renforcement de capacités des communautés et des acteurs étatiques et non-étatiques pertinents, et l'utilisation de mécanismes de redevabilité tels que les actions en justice pour motifs climatiques de manière à renforcer la justiciabilité des droits climatiques et à faire progressivement tâche d’huile. L'intégration des considérations climatiques dans le secteur judiciaire est jugée essentielle pour la préparation institutionnelle.
Appel à une action rapide et intégrée
Sur la base de cette étude, l'UNOWAS et l'OROLSI lancent un appel urgent aux gouvernements et aux partenaires régionaux pour qu'ils adoptent des approches intégrées.
Les principales recommandations incluent l'intégration systématique de l'état de droit et de la justice dans toutes les stratégies d'adaptation climatique, la réalisation d'évaluations des risques tenant compte des droits humains et l'adaptation des cadres juridiques pour garantir une gouvernance climatique efficace, juste et durable.
À défaut d'une action rapide, prévient le rapport, le statu quo ne fera qu'élargir l'écart de justice climatique et laisser passer des occasions capitales de renforcer la sécurité et la résilience de la région face à cette menace existentielle.
ONU